Approche
de la philosophie
ou une histoire philosophique de la raison
J'aimerais
faire ici, un petit tour de la philosophie. Ce petit détour n'est
pas essentiel à mes recherches, mais il fixera plus précisément
mes motivations par la confrontation de mes attentes aux recherches déjà
effectuées dans une direction similaire.
Au dire de beaucoup, la recherche du sens semble passer par la philosophie.
Alors avant de poursuivre seul, je souhaite approcher la philosophie pour
me faire un aperçu de ses découvertes et de son cheminement.
Introduction
en philosophie
Je
désire trouver un sens à ma vie . Cela signifie avoir un
regard sur la vie suffisamment large qui me satisfait en me donnant l'impression
de comprendre la vie. L'objectif final de ce regard est de m'aider à
faire mes choix importants sans avoir à craindre de les regretter
en réalisant après coup que je suis passer à côté
de quelque chose d'essentiel. Je souhaite un sens que je peux confronter
aux différents aspects de la réalité sans avoir à
découvrir qu'il est creux ou qu'il est inconsistant : je ne désire
pas m'attacher à des regards qui se révèlent plus
tard être des futilités, des vérités qui ne
reposent sur rien, qui n'ont rien de fiable, mais qui ont tout d'une fable.
Pourquoi cette peur de l'inconsistance ? Parce que mille affirmations
qui ont servi à donner du sens à des vies se sont révélées
inconsistantes, fausses, contestables.
Il faudrait parcourir l'histoire des philosophies et des religions pour
s'apercevoir que beaucoup des vérités affirmées ne
peuvent prétendre à une consistance solide ; ce sont des
affirmations qui ne peuvent pas se justifier et se défendre. Les
profondes remises en cause ont été très nombreuses
dans le vécu de beaucoup. Le manque de pertinence de certaines
affirmations est un constat incontournable. Il me faudrait pouvoir trouver
des affirmations qui puissent apparaître pertinente, à tous
et dans la durée. Pour accomplir mon souhait profond, il me faudrait
en particulier pouvoir trouver un regard qui rende compte avec satisfaction
du sens global de la vie.
Aussi,
au lieu d'accepter les dogmes ambiants (proposés par nos parents,
amis, autorités,... qu'ils soient politiques, philosophiques, religieux,
moralistes, pratiques ...) se pose la question de la validité des
explications proposées et la question de la découverte d'un
sens satisfaisant.
Quand on cherche à attester la validité d'une explication
de la vie, il y a deux attitudes : on peut chercher à construire
une apologie, en défendant l'explication proposée ou bien
on peut chercher à attester pour soi-même de la fiabilité
de cette explication. Dans le premier cas, on efface les difficultés,
dans le second on cherche le lieu de ces difficultés et, en général,
elles ne sont pas peu nombreuses.
Quand
l'occasion existe de découvrir le dogme des autres avec une certaine
proximité (en ayant connaissance de la profondeur de leur cohérence
personnelle, sans se laisser rebuter par les différences qui dérangent),
la faiblesse de la validité générale de nos dogmes
devient difficile à contourner : en observant l'autre, je constate
qu'il est possible de vivre en niant ces affirmations qui me paraissaient
jusque là indispensables.
C'est l'histoire du conflit des civilisations, du conflit des cultures
: une grande distance laisse indifférent, une courte distance dérange,
mais la proximité interroge.
Si par hasard l'occasion nous est aussi donnée de découvrir
que la multiplicité des dogmes est immense (non pas seulement en
aperçu, mais avec une certaine proximité), c'est le sol
qui se dérobe sous nos pieds dans l'interrogation de la fiabilité
de nos dogmes. Mais point n'est besoin d'aller jusque là pour s'interroger
sur la fiabilité de notre regard sur le monde, certains réagissent
aux premiers malaises.
A
partir du moment où l'on s'interroge, on cherche une explication
qui puisse nous satisfaire. Il existe alors plusieurs façons de
la trouver.
· On peut se satisfaire d'un certain malaise
· On peut rechercher un semblant de cohérence assez superficiel.
· On peut chercher un meilleur dogme qui chasse le malaise.
· Etc...
Mais la philosophie a adopté une position bien à elle :
ne pas poser d'affirmations (de dogme) sans avoir apporté au préalable
des explications qui rendent ces affirmations raisonables. Ainsi la philosophie
cherche à trouver un sens qui ne s'appuie pas sur le dogme mais
sur la compréhension, dans les limites du possible .
Pour parvenir à produire cette compréhension de la vie,
on constate qu'elle utilise deux voies particulières qui se conjuguent
:
· le recherche de clarification qui permet de mieux percevoir les
réalité et d'augmenter l'évidence de ses explications.
· La recherche d'une position, d'un angle de vue, d'un point de
départ qui permette de rendre compte de la réalité
en ordonnant les réalités, les unes par rapport aux autres.
C'est la recherche d'un angle de vue pour clarifier le regard.
Dans tous les cas, quel que soit notre chemin, la recherche de sens a
pour but de trouver du sens ou de se convaincre de la fiabilité
de notre perception des choses.
L'histoire
de la philosophie a apporté un ensemble croissant de difficultés
dont il faut rendre compte pour expliquer la vie. Il est donc de plus
en plus difficile de produire un sens qui apparaisse comme fiable face
à toutes ces difficultés relatées par les recherches
de chacun.
(Jusqu'ici), aucun dogme fabriqué ne rend compte de l'ensemble
de toutes ces difficultés de façon claire. Sans cette perception
globale qui nous permettrait d'expliquer tout, comment avancer ? Il faudrait
avoir fini avant de commencer pour être à l'aise.
La philosophie cherche à construire un regard, une unité
par un moyen autre que les dogmes, qui sont des affirmations non fondées
et souvent non convaincantes. Le seul moyen que la philosophie semble
avoir trouvé et qui apporte une peu de fiabilité sans recourir
à l'usage de dogmes se nomme l'entendement ou la logique, l'intelligence,
l'observation, la réflexion, la sagesse, la clairvoyance, la pertinence,
le bon sens, etc... on le nommera, ici, la raison.
Définition de la philosophie
Tout
le monde fait un petit peu de la philosophie, car tout le monde voit la
vie sous un certain angle et donc avec une certaine unité. Mais
ici, nous cherchons à savoir en quoi ce qu'on appelle " la
philosophie " diffère de ce que chacun possède un peu
en lui.
Ainsi, pour définir la philosophie, nous ne proposons pas une définition
de ce qu'est le sens de la vie ou de la recherche de la compréhension
de la vie. Mais pour définir la philosophie, nous cherchons à
observer de l'uvre concrète qu'ont produit les " philosophes
" dans l'histoire , autrement dit quelle est la tournure prise par
celle qu'on appelle la philosophie dans la recherche du sens de la vie.
A partir d'un bref regard historique et à partir de mon discours
sur le sens de la vie, se dessine à mes yeux une définition
de la philosophie ; c'est une aspiration multiple que j'établis
ici sur trois piliers :
· Une Unité réduite : la philosophie cherche à
trouver une unité du sens en réalisant une réduction
du sens par une approche spécifique qui rend compte de la vie dans
sa globalité.
· L'usage de la raison : la philosophie voit l'utilisation de la
raison comme outil fondamental de prospection dans la recherche de fiabilité.
· La découverte d'une direction : l'objectif final de la
philosophie est de comprendre la position de l'homme et la direction que
l'homme a prise et/ou doit suivre. Ce sont les conséquences pratiques
du regard recherché. Et la plupart des philosophie ne se sont pas
privé de proposer la direction à suivre, sans pourtant que
ce soit une nécessité.
On peut dire que dans l'ensemble, le philosophe sera celui qui propose
une regard raisonnable sur la vie pour atteindre une certaine unité
de sens. Ainsi il est celui qui d'une façon ou d'une autre dit:
" la vie c'est... ", à partir d'arguments.
[Une remarque s'impose après cette définition : il existe
certaines philosophies qui ne cherchent pas à construire du sens,
mais plutôt à détruire. De telles philosophies ne
rentrent donc pas dans cette définition. Observons un peu plus
en profondeur pourquoi je conserve cette définition.
En effet, devant le constat des difficultés immenses qui s'accumulent
et en particulier devant la difficulté des systèmes philosophiques
à produire une unité acceptable (chacun des systèmes
étant contesté par d'autres systèmes), certains voient
davantage la philosophie comme le lieu de la découverte du manque
de pertinence des dogmes.
Mais commentons cette position : si l'on postule que la philosophie n'offre
qu'un rôle de déconstruction, elle renie l'objet de son désir,
à savoir, l'unité du sens.
Si l'on pense comme le propose l'essentiel de toute philosophie que seule
la raison (réflexion, observation, analyse, ...) peut conduire
dans un sens fiable de la vie, refuser l'unité du sens de la vie
au profit dune déconstruction, c'est faire du sens de la vie une
auto-mutilation, parce que la philosophie ne mènerait qu'à
se déconstruire.
En pratique, cette volonté de déconstruction possède
son " unité " philosophique: un nihilisme comme seul
sens, qui est la déconstruction complète du sens.
Par des observations historiques, on pourrait contester que le nihilisme
ne soit jamais devenu un sens vécu et suggérer que l'usage
d'une telle philosophie de la déconstruction profite en pratique
à un dogme particulier plutôt qu'elle ne souhaite imposer
son sens global à toute la vie. Dans ce cas, la philosophie de
la déconstruction, n'est plus une recherche de sens, mais un outil
pour un sens particulier ; à moins que ce soit un désespoir
qui conduise le chercheur à renoncer à ce sens unifié
tant désiré et lui impose la seule " unité perçue
" : la déconstruction. Nous laisserons donc de côté
la pure déconstruction pour nous limiter à la philosophie
qui cherche le sens. C'est justement parce que la déconstruction
ne détruit pas tous le sens (nous sommes vivants et notre vie continue
au-delà des théories) que l'on peut croire en un sens plus
vaste que la déconstruction. Ainsi à mes yeux, la philosophie
vue comme interrogation n'a de sens que dans le désir de construire
du sens et pas seulement pour détruire les dogmes. ]
Les points de départ de la philosophie
Il
me semble que cette approche de la philosophie en trois points permet
de rendre compte d'une bonne partie de l'histoire de la philosophie (il
restera cependant des points plus délicats à traiter). Détaillons
ici chacun de ces trois points.
a
- Chacune des trois aspirations
Direction
humaine
Comprendre la position de l'homme (comprendre où en est l'homme
et quelle direction il doit prendre) est un objectif de la philosophie.
Seulement, en pratique chacun possède déjà des directions,
des règles de décision, que ce soit les groupes ou les individus
: ce sont des systèmes de valeurs et de règles qui décident
des directions prises et à prendre. Ces systèmes sont, en
général, complexes et même assez mystérieux
: on ne voit souvent ni la structures des règles, ni le parcours
dans cette structure qui décide des choix.
La question du " que faire de sa vie " est d'autant plus importante
que l'on possède l'impression de pouvoir choisir.
Les pratiques humaines sont tellement différentes, tellement contradictoires.
S'il existe un enjeu à la perception de l'unité, il existe
de même un enjeu (au moins aussi important) à voir et comprendre
la direction humaine. Comprendre la direction humaine est une sorte d'aboutissement
naturel de la perception d'unité.
La raison permet de comprendre les immenses oppositions des pratiques
humaines et l'on arrive pas à trouver une unité de sens
qui rend compte de cette diversité et de ces contradictions.
Philosopher jusqu'au bout, c'est proposer un chemin qui dépende
du regard que l'on a de la vie. Les philosophe s'évertue donc à
trouver des regards, puis à proposer des directions en fonction
de ces regards.
Il y a dans la vie une nécessité urgente de direction face
aux choix important qui s'imposent sans cesse à nous. C'est là
un point crucial : les choix se succèdent mais le manque de compréhension
est cruel.
Aussi, c'est souvent par le besoin de résultat, de propositions
pratiques plus que par l'évidence et la fiabilité qu'est
mûe la philosophie. On propose des regards et des directions à
suivre parce qu'on a besoin de regard et de direction à suivre.
Mais le vrai philosophe a besoin de conclusions fiables.
Réduction
à l'unité
L'existence de réduction sous forme d'unité du sens existe
déjà de façon naturelle dans chaque civilisation,
société et pour chaque individu : ce sont les dogmes et
les religions, ou bien les " philosophies individuelles " de
chacun (les " comment je vois la vie ").
Seulement, les erreurs criantes, le manque d'évidence, le manque
de pertinence sont parfois si criant que les " réductions
de sens par une approche particulière " ne peuvent être
acceptées sur le simple fait qu'elle propose une unité de
sens. Il faut que l'unité proposée soit recevable, cohérente
et fiable.
Ainsi, toute propositions de sens par un dogme appelle à la critique.
Et en philosophie, l'instrument de la critique est la raison.
La
raison
La découverte de la raison est à la base de la philosophie.
C'est peut être là que l'on distingue la particularité
de la philosophie dans la recherche du sens de la vie. C'est l'usage fondamental
de la raison.
La philosophie cherchant le sens par le discours raisonnable s'est naturellement
très vite intéressé à la raison elle-même.
Qu'est-ce que la raison ? Et bien la raison, comme le reste de la vie
est une réalité polymorphe qu'il est difficile d'unifier.
On peut, de façon un peu arbitraire, proposer quelques un des aperçus
possible de la raison :
· La raison comme pouvoir de conviction : c'est de cette recherche
qu'est né le sophisme qui est l'art du discours pour convaincre
l'autre d'une chose quelconque. En cela, la philosophie découvrait
un de ses propre piège : la possibilité de convaincre de
ce qui est faux. La conviction n'était donc pas l'outil le plus
à même de produire la raison la plus utile à la philosophie,
il fallait plus.
· La raison comme pouvoir de fiabilité : c'est de cette
recherche qu'est née la science, la connaissance fiable, la connaissance
qui peut se communiquer et convaincre non par l'art de la rhétorique,
mais par la pertinence et l'expérimentation.
C'est la philosophie qui est à l'origine de la découverte
de la science et donc des prodiges technologiques. On pourra penser aux
sciences dures dont les pères sont souvent des philosophes qui
cherchaient un sens unifié à la réalité. La
philosophie avait enfin trouvé le terrain de sa noblesse : elle
avait produit un sens qui pouvait se partager et convaincre quiconque
se donnerait les moyens de la raison pour y parvenir. Cet engendrement
de la science par la philosophie est la base de la confiance en la philosophie.
Elle a pu produire des connaissances vraiment fiables.
Maintenant, quand on considère l'étendue des résultats
de la science, on comprend qu'ils sont encore beaucoup trop restreints
pour atteindre l'unité de sens attendue par la philosophie. Il
existe alors toutes sortes d'attitudes de la philosophie vis à
vis de la science :
- un mépris à cause de son incapacité à atteindre
l'essentiel, un espoir à cause de sa capacité à produire
de la fiabilité (reste à voir quelle fiabilité, car
la question n'est pas facile à traiter),
- une attente sceptique sur le champs de ces capacités,
- plus aucune attente et on se tourne vers d'autres formes de raisonnement,
- ....
· La raison comme forme de la fiabilité : c'est de cette
recherche qu'est née la logique. C'est le constat de l'existence
de forme générale de la fiabilité. Puisqu'il semble
que la fiabilité possède certaines formes autant les trouver
de façon exhaustives. De telles formes existent et c'est la logique,
constituée en discipline scientifique indépendante qui les
recherche. Depuis Aristote, qui pose les formes générales
de la logique, jusqu'à la logique formelle du XXième siècle
(sans parler de la recherche de fondations logiques à ces logiques
pour finir). La dimension et la forme de la logique n'ont cessé
de s'affiner pour parvenir à une forme assez surprenante de la
fiabilité : la logique formelle dont nous reparlerons.
· La raison comme capacité mentale : c'est la capacité
de raisonner. C'est un mystère complexe. Il existe énormément
de questions sur cette capacité de raisonner. Pour la philosophie
qui cherche le sens de la réalité, il était naturel
de choisir comme angle d'approche l'étude de cette capacité
mentale. Seulement, face à tous les mystères qui existent
autour de la capacité de raison, les angles d'approche sont très
variés : logique intuitive, psychologie, psychanalyse, phénoménologie,
sémiologie. La capacité du raisonnable est un concept très
vaste d'accès.
· la raison comme langage raisonnable : toute capacité de
raisonner s'exprime et se construit à partir du langage, l'approche
de la raison peut donc se faire par une approche du langage. L'étude
des structures du langage est difficilement contournable dans la recherche
philosophique d'un sens unifié. La linguistique, et particulièrement
la philosophie du langage, ont pris une dimension très importante
dans les pratiques philosophiques ces dernières années.
Cela est né de la prise de conscience de l'incontournable réalité
du langage pour construire le sens.
· La raison comme capacité humaine particulière :
la raison ne peut-être réduite à la seule logique,
car c'est la capacité humaine globale de se comporter, d'analyser,
de réagir, de s'inscrire dans une réalité qui est
nécessaire de prendre en compte. Ainsi la dimension de la raison
est quasiment identique à la dimension humaine. Ainsi est né
la tentative de procéder à un minimum de perte dans le choix
de la réduction : la raison, c'est la raison humaine dans toutes
les formes que l'on peut constater par l'observation.
b
- Problème de la direction
Si trouver une direction pour l'homme est un objectif de la philosophie,
on conçoit qu'y parvenir est assez difficile et qu'il est facile
de céder à la tentation du dogme : poser la direction sans
éprouver sa fiabilité.
Aussi, pour ne pas tomber dans ce travers, la philosophie possède-t-elle
parfois une simple dimension descriptive, en prenant du recul par rapport
à son intention finale de définir une direction. En effet,
on comprendra assez facilement (je crois?) que la direction proposée
sera d'autant plus fiable que la perception sera globale. Tant que la
perception n'atteint pas un certain degré d'unité, il semble
assez raisonnable de suspendre le jugement. C'est le cas d'un certain
nombre de pratiques philosophiques acutelle qui cherche à comprendre,
à réveller des détails claires, plus qu'à
résoudre le sens profond de l'unité de la raison.
Mais dans l'ensemble, historiquement parlant, la plupart des philosophies
proposent une direction dès l'instant où elles ont eu l'impression
de proposer un regard global, autrement dit à partir de l'instant
où elles ont eu l'impression de trouver une " réduction
du sens à l'unité ".
c
- En pôle double
A partir du moment où l'on se concentre sur le désir de
réduction à l'unité à partir de la raison,
il semble assez logique que la conjugaison de cette réduction avec
les différentes approches de la raison conduisent à autant
de perceptions différentes du sens.
Fiabilité
- positivisme
Si la réduction de sens est accomplie par la raison vue comme "
pouvoir de la fiabilité ", on aboutit au positivisme : le
positivisme est le sens unifié vu sous l'angle de la connaissance
fiable. La possibilité attestée par l'expérience
d'une connaissance fiable (positive), remplit pleinement le désir
de l'aspiration philosophique. On s'engaillardit alors à souhaiter
la réduction du sens à cette pratique de la raison fiable
qui est une aspiration initiale et donc chère à la philosophie.
Le problème qui se pose est l'incapacité momentanée
de réduire la totalité du sens à cette dimension
fiable. Aussi, provisoirement, la direction déclamée consiste
à accomplir cette réduction complète et la suite
s'en suivra nécessairement... puisqu'il s'agit de fiabilité.
En logique, le problème qui se pose est de savoir si cette réduction
est réellement possible ; rien ne l'affirme en principe. Il se
greffe encore bien d'autres difficultés sur cette réduction
; en particulier la question suivante : quelles directions concrètes
(morales) donner à l'homme tant que l'on ne connaît pas la
réalité avec fiabilité ? Et chacun d'y aller de son
argument et de ses impressions...non fiables.
Conviction
- relativisme, scepticisme
Si la réduction de sens est accomplie par la raison vue comme pouvoir
de conviction, il se dresse alors un problème sérieux. En
effet, l'histoire de la philosophie, (mais c'est aussi l'histoire des
dogmes qu'ils soient ou non philosophiques) montrent que la réduction
du sens est très difficile à établir. Toutes les
réductions proposées, aussi bien raisonnables que dogmatiques,
peinent à établir l'adhésion des convictions de chacun.
Il existe toujours des grande masse de réticents avec des arguments
percutants. Aussi par expérience ou par désespoir, naît-il
une certaine confiance sur l'impossibilité d'une réduction
convaincante. Il semble que la conviction n'existe que dans des réalités
bien locales, mais pas au fondement de sens global.
Il naît alors le refus d'un absolu, le refus d'une réduction.
Quand à force de creuser, on prend conscience de l'absence de fondement
à pratiquement toutes les réalités, quand en plus,
on prend conscience que même les réalités les plus
fiables d'apparence possèdent une dimension très impalpable,
il peut alors naître un rejet plus massif encore : le scepticisme
qui rejette toute conviction et qui place toute la connaissance dans la
subjectivité et dans l'incapacité de produire une affirmation
fiable.
Capacité
mentale - phénoménologie
Si la réduction de sens est accomplie par la raison vue comme "
capacité mentale tout à fait à part ", la réduction
est opérée à l'intérieur de l'esprit. Le sens
est réduit à la capacité humaine à éprouver
le sens. La réalité prend alors une dimension immense par
laquelle tout doit être expliqué en terme de sens "
ressenti depuis l'intérieur ". Naît alors le désir
d'étudier les formes de ce ressenti qui expliqueront l'organisation
de la réalité humaine. C'est la phénoménologie.
Le problème de cette réduction est qu'elle se concentre
beaucoup sur un type précis de ressenti bien éloigné
de l'ensemble des réalités, dont elle rend difficilement
compte. Elle parle du ressenti des réalité, mais peu ou
pas des réalités elles-mêmes. On a l'impression qu'elle
passe à côté de l'immensité de la réalité.
On est alors en droit de s'interroger sur la pertinence de cette réduction
comme fondamentale.
Le logique comme contenu - le discours métaphysique.
Si la réduction de sens est accomplie par la raison vue comme "
un contenu logique ", une apparence logique, on aboutit au une réduction
qui prend la forme d'un discours purement logique. Ce type de discours
ressemblera étrangement à bien des arguments métaphysiques
sur Dieu, sur l'âme, sur l'être qui l'histoire philosophique
à fournit en aondance,.... Ce sont des discours ontologiques reposant
sur la pure forme logique.
A partir du moment ou l'on considère que l'essence de la raison
est de produire de formes logiques, la réduction devient assez
facile, en ce qu'elle se présente comme une forme logique. Le problème
de ces discours, qui résolvent " très facilement "
les grandes questions par la confiance en un discours, est qu'ils peuvent
justement poser un problème de confiance. La confiance en la forme
logique n'est pas totale, et la pertinence de ces discours est très
relative ; pour y adhérer, il faut y croire...
La
raison humaine - anthropologie
L'objectif de la philosophie étant de donner une direction à
l'homme, il n'est pas de meilleure réduction que de ne pas trop
réduire, en cherchant un regard aussi large possible sur l'homme.
L'anthropologie est donc science de l'observation de l'homme, en particulier
de l'homme intérieur par ses manifestations extérieures.
Seulement, entre les promesses de réduction et la réduction,
on se demande si on a gagné en réduction. Car il est vrai
qu'il s'agit d'une étude de l'homme. Cette étude à
gagner en largeur par rapport à la philosophie jusque là
pratiquée, en étudiant l'ethnologie, la sociologie, la linguistique,...
Mais justement, il existe tellement d'approches différentes possibles
qu'il est difficile d'opérer une réduction à partir
de ces études très éclatées. On constate des
points communs, on constate des réalités, mais il semble
que le champ des " concepts importants " ne cesse de croître
de telle sorte que l'on s'éloigne toujours plus d'une réduction
qui d'ailleurs est difficile à imaginer par principe : l'observation
en soi n'est pas une approche suffisante pour produire une réduction,
elle n'est qu'un support pour proposer une réduction. Mais sur
quelles bases proposer de telles réductions avec fiabilité
?
Au total, il semble que la raison humaine est aussi vaste que son observation...
De plus, il se pose un autre problème de fond : les constats d'observation
ne donnent pas de méthodologie quant aux directions que l'homme
aurait à suivre. Ainsi, l'anthropologie aura bien du mal à
parvenir au bout des prétentions philosophiques, sans le choix
de dogmes permettant d'interpréter globalement les observations...
Le
langage comme forme - le structuralisme
On a vu que la fiabilité idéale a été atteinte
en science par le langage de la logique formelle. Or l'apparence de cette
logique est d'être pure forme sur des symboles vidés de tout
contenu sémantique. On appelle cela structure formelle. Dans cette
direction, on peut chercher le fond de la réalité dans l'idée
de structure fiable.
Mais la réduction à cette " unité " pose
d'autres problèmes : quelle place donner à ce qui n'est
pas définissable en forme complètement logique ? L'approche
structurale répondra par l'impertinence d'une telle hypothèse
en disant : ce n'est qu'une mauvaise perception qui suggère la
non-structure. Mais en pratique, la perception d'absence de structure
fiable est tenace, et tellement tenace qu'elle décrédibilise
la réduction à la perception uniquement logique et structurelle.
La
langage comme sens - l'herméneutique
Il est peu de réduction philosophique qui trouverait instinctivement
dans le langage l'essence même de toute réalité. Mais
à force de chercher par les mots le sens de la réalité,
on peut penser que c'est justement dans les mots que se trouvent la réalité
; une réalité qui n'est plus une structure, mais un signifié.
La réalité est un sens produit par le langage. Ainsi, dans
la recherche du sens profond du langage se trouve une autre réduction
de la réalité. Dans cette idée, l'herméneutique
cherche le sens profond véhiculé par le langage. Mais sur
ce thème, se fondent plusieurs approches assez variées.
Au fond, cette démarche repose sur le constat de l'impossibilité
de réduire le langage. En effet, le langage est le mystère
qui centre en lui toute les question de sens, il semble donc assez logique
de rechercher dans le langage lui-même, l'unité du sens de
la réalité. Mais un reproche assez facile à cette
réduction est que si le langage permet de construire le sens, il
n'est pas certain qu'il en soit le seul agent ; et même plus, il
est plus que certains qu'il ne soit pas le seul acteur à être
présent dans le " magma du sens", de sorte que la réduction
au langage est tellement étroite qu'elle est difficilement crédible.
d
- Les dogmes élargis
Des formes moins extrêmes de réduction existent : au lieu
de réduire la réalité à une seule forme par
laquelle regarder toute les autres, on réduit la réalité
à un schéma de réalités fondamentales où
aucune forme ne possède la prévalence complète. Bien
des dogmes religieux ou philosophiques fonctionnent sur de tels schémas
assez large : l'explication du sens de la vie est multiple et étendue.
Elles ne pointent pas sur une réduction à l'unité.
On a aussi le cas où le dogme propose seulement des affirmations
donnant une direction à l'homme sans pour autant avoir une tendance
à la réduction de la réalité. Il existe toutes
sortes de degrés dans ces non-réduction (les religions en
sont des bon exemple : bouddhisme, judaïsme, christianisme, islam.
Certaines affirment plus de réduction que d'autres). Mais il n'est
pas que les religions qui usent de telles schém, bien des philosophies
affirme sans avoir réduit.
C'est d'ailleurs une approche de la philosophie que de regarder en système
plutôt qu'en réduction. Beaucoup de " grands "
philosophes ont proposé des systèmes philosophiques. Maintenant
la frontière entre système et réduction est ténue,
certains ont des bases plus réduite ue d'autre, certains englobe
une réalité plus ou moins grande dans leur système.
Mais en philosophie, le problème de toute les réductions,
de tous les système ou de toute les affirmations dogmatiques consistent
toujours en la justification des formes choisies. On peut faire ressentir
l'importance, la pertinence et l'étendue de chaque concept, mais
affirmer leur prévalence ou la fiabilité globale du système
est un acte dogmatique. On ne peut y échapper, chacun propose un
regard c'est à l'autre de juger s'il est ou non pertinent.
e
- Renoncement à la réduction
Face à toutes ces difficultés, face à l'incapacité
d'une unité globale, une philosophie particulière de la
vie consiste à renoncer à tout réduction. Renoncer
à toute réduction, c'est chercher le sens dans la vie elle-même
et pas dans une théorie ; c'est donc se laisser porter par la vie.
Seulement, aussitôt qu'une théorie sur le sens est formulée,
elle est aussitôt réduction puisqu'elle propose une vue d'ensemble
en quelques mots.
Proposer le renoncement à la réduction comme réduction
est une contradiction logique. Qu'à cela ne tiennent, pourquoi
la logique serait-elle maîtresse des lieux ?
Dans tous les cas, même au-delà de l'aporie, on conçoit
que ne pas vouloir donner de sens, c'est un peu renoncer à chercher
un sens et se soumettre à celui qui nous viens instinctivement.
C'est donc un peu le contraire de la démarche philosophique qui
consiste à éprouver la fiabilité de ses perceptions.
C'est une sorte de renoncement à un sens raisonnable.
Les questions philosophiques :
Après les aspirations de la philosophie, il y a les contenus :
c'est-à-dire les questions et les prises de positions.
C'est peut-être par là qu'on aurait du commencer pour comprendre
combien les questions existent en réalité, mais les contenus
et les direction choisies dépendent tellement des aspirations qu'un
auditeur ignorant de ces aspirations n'aurait pas forcément compris
les réactions très " philosophiques " face à
ces questions.
Il est temps d'aborder les contenus, ou plutôt le choix de quelques
contenus qui m'ont paru important, autant pour mes recherches que pour
la pertinence des questions posées (face à nos connaissance
actuelles). Historiquement, il existe bien d'autres questions philosophique
qui seront passé sous silence ici.
Si nous présentons ici la philosophie sous forme de questions,
c'est pour la rendre plus accessible (une affirmation heurte davantage).
Mais en pratique, c'est souvent sous forme d'affirmations que sont nés
les prise de positions philosophiques. Leur naissance est souvent issue
de contextes qui ne laissaient pas la place à l'interrogation car
les concepts étaient développés pour répondre
à d'autres questions. Mais c'est justement leur aspect d'affirmation
péremptoire qui permet de se poser la question de la validité
des réponses proposées.
En réalité, il faudra souvent du temps pour dégager
les question des réponses, mais parfois cela se fait très
vite. Ici, nous ne rendrons absolument pas compte de ce temps de maturation,
de sorte que les questions que nous poseront seront passablement anachroniques.
Ainsi, les questions proposées ici ne sont souvent pas celles qui
ont historiquement été posées.
a
- Histoire de questions
Comme toute histoire n'est jamais qu'une histoire librement composée
sur nos préférences ou celles des transmetteurs de l'histoire,
voici de façon très libre ma petite histoire de la philosophie
au travers de quelques questions.
Quels
sont les principes originel de la nature ?
C'est une des questions de base de la philosophie. C'est la question de
la nature profonde de la réalité (en langage philosophique,
c'est une question d'" ontologie "). Mais c'est aussi la question
de la formation de la nature (comment se fait-il que la réalité
de la nature soi là).
Cette question très ancienne est un petit peut à l'origine
des science de la nature. Avec en son cur la question de la physique
: il faut rendre compte de l'existence matérielle, il faut expliquer
la nature comme issue de principe réduit.
Les systèmes proposés à l'origine sont tirés
d'une logique de " l'impression ressentie " (les logiques proposées
n'ont qu'une réalité logique destinée à convaincre,
elle n'ont pas de caractère explicatif, ni expérimentale
attestant de cette réduction). Selon nos commentaires précédents,
on pourrait qualifier cette approche de " métaphysique ".
Mais au lieu de dogme, on constate une recherche de compréhension
par l'observation de la nature. C'est l'école de Millet qui pose
ces questions (VIè siècle avant Jésus-Christ).
On peut dire que cette question possède toujours une actualité,
car on cherche toujours à définir les principes profonds
de la nature. Si la question est à peu près conservée,
la réponse, elle, est bien transformée car la science a
montré de nombreuses couches de réalité à
l'intérieur de cette nature naïvement visible. Rendre compte
de la nature nécessite maintenant de rendre compte de ces couches
intermédiaires.
Qu'est-ce
qui nous permet de parler des choses avec fiabilité, même
pour les plus évidentes ? Qu'est-ce qui nous permet de croire à
la réalité des choses dont on parle ?
Héraclite nous informe que ce qui est toujours (ce qui est vrai,
ce qui est réalité) nous est caché : c'est le logos.
Nous pouvons nous en approcher, mais il demeure caché. La réalité
est une harmonie faite de contradictions. " on ne rentre jamais deux
fois dans le même fleuve, pas même une fois !". Xenophane
ajoute que tout ne nous est peut-être pas accessible, il existe
peut-être des " natures incompréhensibles ".
C'est la question de l'accès à la réalité
qui se pose. Ici, le logos, serait une réalité idéale
inaccessible dans son fond. Mais la question de la réalité
est loin d'être terminée.
Quel
est la place des nombres dans la réalité ?
Avec Pythagore se pose la question de la présence du nombre dans
la réalité ; présence qui donne accès à
une compréhension précise dépassant largement la
perception naïve. Le nombre est donc une réalité profonde.
Si Pythagore pose le nombre comme réduction de la réalité,
il s'en suis forcément tout un système d'analyse de la réalité
par le nombre selon de pures spéculations logiques (privée
de l'expérience).
A cette réduction, on peut mettre en parallèle une citation
moderne comme "Le grand livre [de la nature] [...] est écrit
en langage mathématique " d'Einstein, à la suite de
Gallilé, grand penseur de la réalité. La question
philosophique qui se pose est la place de la réalité mathématique
dans la nature (et donc dans la réalité humaine aussi) ?
Quel est donc le lien qui les unis.
La question de l'un est du multiple se pose : comment se fait-il que tout
est multiple alors que le principe de la compréhension est d'être
Un ? Ou comment peut-on voir des généralités, des
catégories dans ce qui est pure singularité ?
C'est le début de la question de l'identité des choses,
la question des catégories. Ces unités sont-elle premières
ou fabriquées par l'esprit ? Sans ces unités rien ne serait
perçue. Que sont alors ces multiplicités ? Empédocle
propose des logiques métaphysique expliquant le passage de l'un
au multiple.
Traduit actuellement la question pose encore problème : notre tendance
à mettre des étiquettes sur des groupements de réalité
très singulière est-il justifié ? Quelle réalité
se cache derrière ces étiquettes ?
La
question de l'infini : est-ce une réalité, un existence
fondamentale ou une pensée ? Quel est la place de l'infini dans
la réalité ?
Cette question est de nature plutôt métaphysique, mais elle
a été ravivée par les constructions de la logique
formelle du début du XX siècle. L'idée d'infini comme
réalité impossible à atteindre est un peu empiété
par les mathématiques : on définit non pas un infini, mais
plusieurs infinis (et même beaucoup plus ). Certaines questions
issues des représentations mentales et des définitions mathématiques
interrogent sur la différence entre le dénombrable et le
continu. Ainsi, à la suite de Cantor, l'infini posséderait
donc une morphologie.
Mais cette question n'est pas réservée aux mathématiques.
La question de l'infini se pose et se posera dans une dimension métaphysique
car notre esprit semble capable de l'imaginer, mais incapable de le "
réaliser ". On joue ici sur les mots, mais c'est justement
la question de l'infini qui se pose dans des termes ontologiques. Quelle
bien curieuse représentation mentale que l'infini.
Qu'est-ce
que la matière ? La matière est-elle vide ou pleine ?
Cette question peut nous sembler assez saugrenue face à nos connaissances
en physique. Mais elle animera beaucoup la philosophie.
Le fait que l'expérience décide de la réponse sera
justement l'occasion d'une reconnaissance de la fiabilité de l'expérimentation.
Pourtant en pratique, les expériences sur la pression (de Pascal)
seront loin de décider complètement du concept qui aujourd'hui
encore possède une certaine pertinence dans les questions dans
la mécanique quantique. Mais la question du vide ou du plein de
la réalité prend une forme beaucoup plus précise
et technique : c'est la topologie mathématique de la réalité.
Quelle
est la nature de Dieu?
Xénophane affirme l'unicité d'un Dieu esprit qui ressent
tout dans une intelligence suprême. C'est la réduction par
le haut. Cela se fait couramment dans les discussions philosophiques fondées
sur les pures formes logiques : c'est la métaphysique.
Qu'est-ce donc que l'être, l'existence, le fait d'exister plutôt
que ne pas exister ? Quel différence y a-t-il entre ce qui existe
et ce qui n'existe pas ?
Parménide posant cette question y voit la réduction ultime
de la réalité. Dans le concept d'être se trouve le
principe d'une réduction immense de toute " réalité
". (qui n'est accessible que par la logique du langage métaphysique).
Cette question ontologique va hanter et se propager dans la philosophie
sous toutes sortes de formes. Ce concept d'être ou d'existence se
propose comme une réduction de la réalité. Chaque
philosophe se sentira la nécessité de se positionner par
rapport à ce concept.
La question de l'être est immense en philosophie, mais on peut voir
un peu plus loin encore. C'est toute la question de la réduction
ultime qui se pose là : tout résumé du " tout
" à un seul concept est une tentative qui rend toute définition
de cet unique concept délicat en logique. Toutes sortes de morphologies
logiques seront proposées pour tenter d'expliquer cette réalité
ultime de l'ontologie.
Quel
est le rôle de " l'intellect " dans le regard sur le monde
?
Anaxagore propose de comprendre que sans " l'intellect ", il
n'y a qu'un tout, et seul l'intellect en mouvement permet de dissocier
et de séparer ce mélange. Il y aurait l'intellect humain
et l'intellect supérieur. Il s'agit là encore d'une approche
logique, mais on discerne dès a présent les termes d'un
discours qui sera aussi bien prolongé dans l'histoire de la philosophie
: le rôle du sens et de la pensée.
Existe-t-il
une réduction atomiste qui rende compte de la réalité
?
L'atomisme consiste à voir la nature comme composée de réalités
en nombre inimaginable qui possèdent toutes une nature identique
(l'un et le multiple) mais qui diffèrent par des formes particulières.
En se rencontrant par nécessité, ces " atomes "
donnent naissance par les lois ambiantes à toutes les réalités
observées.
Démocrite nous dit que les atomes sont à comprendre comme
des faits bruts de " l'intelect ", ce qui est assez éloigné
de notre perception atomiste moderne.
C'est la question de la réduction de la matière à
une simple réalité symétrique qui se propose ici.
Comment se fait-il que sans les connaissance de la physique moderne, on
puisse avoir une telle idée ?
Est-ce que la réflexion sur l'un et le multiple est réellement
à la base de la découverte moderne ? Est-ce le souhait de
la réduction qui s'est trouvé exhaussé dans la physique
moderne ? Ce souhait correspond-il alors à une perception ?
Quel
rapport entre la réalité et nos sensations de la réalité?
Démocrite propose de ne pas s'y fier, car nos sens sont tous simplement
une altération de la réalité et non la réalité
elle-même. On trouve ici, la naissance d'un problème logique
fondamentale sur la dualité entre réalisme et idéalisme.
Chez Démocrite, c'est le réalisme qui l'emporte. Mais par
une telle affirmation, c'est la question de la dualité qui est
posée et qui fera son chemin.
Immédiatement
après se pose la question : comment les sensations sont-elle possibles
?
Puisque nous croyons voir la réalité alors qu'il n'en est
rien puisqu'elle n'est pas en nous, Démocrite propose que des ondes
nous en apportent un simulacre à nos sens. On discerne ici la base
d'une question très difficile encore aujourd'hui sur la perception
: comment se fait-il qu'on perçoive " la réalité
" ?
La
question de la relativité des discours : comment se fait-il que
l'on puissent démontrer tant de choses et leur contraire par l'usage
du discours raisonnable ?
Ce sont les sophistes comme Protagoras qui ont montré par la pratique
le problème de la fiabilité de la langue : la relativité
des vérités. Les vérités sont des accords
entre les hommes, propose-t-il.
Voilà des questions qui se posent avec une force toujours renouvelée.
C'est
la question du pouvoir de la parole : jusqu'où la parole est-elle
productrice de sens ?
Avec les sophistes, comme Gorgias qui voyait en la parole une source illimité
de construction de sens et de pouvoir sur les hommes, il se pose la question
de la nature du langage : tout peut-il être rendu réel par
le langage ? Ou encore : quelle est la part du langage dans la réalité
? Quelle est la part de réalité dans le langage ?
Le
problème de l'immortalité de l'âme ?
Socrate pose l'immortalité en disant que c'est une chance qu'il
vaut la peine de courir.
L'idée de " quelle suite à la vie humaine après
la mort " est une question de fond à laquelle tout système
philosophique assez large tente de donner une réponse. Car par
la mort, c'est le sens de notre vie qui se pose en question. La réalité
de la suite à la vie est primordiale pour la réponse du
sens de la vie.
La
nature de l'âme ?
Platon propose une description de l'intérieur de l'âme humaine.
Ainsi, c'est aussi la question de la nature de l'âme qui se pose
et qui se renouvellera très souvent. Quelles sont les catégories
de l'âme ? L'intelligence, les désirs, les sensations, la
mémoires,...? C'est la naissance de la psychologie ; science difficile
et non éclaircie à ce jour.
Comment
la logique peut-elle définir la politique ?
Avec Platon qui décrit la cité idéale, se pose la
question de la possibilité politique de la raison. Peut-on trouver
par la raison comment diriger les structure sociale ?
Cette question est loin d'être résolue parce qu'en tant que
direction humaine, la politique est un des objectif finaux de la philosophie.
Résoudre la politique par la raison reviendrait à avoir
perçu la dimension humaine et savoir comment sur elle.
L'histoire nous a montré tant de propositions logiques (philosophique)
sur le " comment gérer la politique " qu'il est difficile
d'en faire une présentation succincte. Mais la fiabilité
des systèmes est loin d'être établie et encore plus
loin d'être unanime.
Quelle
est la nature réelle des idées ?
Platon conçoit un monde des idées complètement réel
vers lequel doit se hisser l'homme à partir du sensible. C'est
un monde de la perfection qu'il est difficile d'atteindre et dont on ne
perçoit en général que les ombres.
On trouve ici, une interrogation profonde qui nous montre que l'intelligence
peut avoir accès à des connaissances qui permettent de rendre
compte du monde sensible de façon très générale
et fiable. Le regard direct sur la réalité est faux et naïf.
Il n'est qu'une " ombre de la réalité ", c'est-à-dire
une réduction bien imparfaite de ce qui est parfait.
En pratique, on constate en effet que l'intelligence a accès à
des réalités souvent plus fiables et possédant un
pouvoir qu'une connaissance naïve n'a pas. Aussi l'existence de réalité
d'ordre supérieur à l'observation directe se pose.
Mais au-delà de cette " réalité des idées
", c'est la question du rapport entre les idées et le monde
qui se pose. Platon suggère que connaître c'est se souvenir
des réalité parfaites vues jadis. Mais beaucoup d'autres
théories sur la " possibilité de la connaissance "
vont naître. Encore une fois, une affirmation désigne une
question. Ainsi, aussitôt derrière Platon, c'est Aristote
qui va proposer une autre morphologie de la connaissance.
La
logique serait-elle la première source de la connaissance ?
C'est Aristote qui pose la question en posant l'affirmation de la logique
comme science première à la racine des autres sciences.
Or la logique se révèle être une connaissance d'une
fiabilité inégalée. Quel rapport entretient-elle
avec la réalité ?
Quel
est la forme de la logique ?
C'est Aristote en proposant un exposé de forme qui interroge sur
l'ensemble des formes qui permettent la fiabilité des connaissances.
Cette discussion a beaucoup évolué pour parvenir à
la logique formelle. Mais là encore, elle ne connaîtra pas
sa fin. Et dans toute son histoire, la logique sera l'occasion de beaucoup
de découvertes et de paradigmes sur la représentation de
la réalité (les théorèmes de Gödel par
exemple).
Est-ce
que la réalité perçue est la vraie réalité
?
En effet, on constate que notre perception de la réalité
est complètement guidée par notre jugement et nos théories.
Dans notre perception s'ajoute notre avis, notre opinion. On le constate
car dans nos regards s'ajoutent toutes sortes de catégories, d'unités
qui n'existent pas dans la singularité observée. (on ne
voit pas des taches de couleurs, on voit des objets et même plus
parfois : des concepts abstraits comme des figures géométriques
par exemple).
Si nous formons nous-mêmes la réalité en nous, il
n'est donc pas étonnant que nous soyons en accord avec nous-mêmes
dans nos jugements. Mais sommes-nous en accord avec la réalité
débarrassée de ces ajouts de nous-mêmes ?
C'est Pyrrhon qui pose la question en décidant de ne plus juger
des choses car nous sommes systématiquement trompé par nous-mêmes.
Le scepticisme reformule les questions sur la véritable nature
de nos connaissances, au travers d'Agrippa dans les questions qui suivent
:
Pourquoi
existe-t-il des conflit entre les opinions ? Pourquoi ne parvient-on pas
à les résoudre en produisant une vérité qui
met tout le monde d'accord ?
Tout argument proposé pour prouver une vérité ne
demande-t-il pas à être prouvé lui aussi ?
Ce qui conduit à infirmer la possibilité d'une réduction.
(tout est lié, on ne peut réduire les choses à un
support. Toute réduction devra toujours expliquer le fond de ses
choix. Il n'existe donc pas de " fond ")
Toutes les connaissances ne sont-elle pas des relations entre d'autres
connaissances et aussi des relations entre ces connaissances et l'observateur
? La dépendance des réalités, et la dépendance
à l'observateur ne permet pas de réduire la réalité.
Tout est inexorablement lié.
Proposer une hypothèse ou un point de vu, est un acte arbitraire
et dogmatique ? Or, comment pourrait-on parler autrement ? De plus dans nos discours, on justifie souvent nos arguments en se
servant de leur validité, ce n'est pas correct.
Après le scepticisme les questions se poursuivent.
Pour
ne pas être trompé par le raisonnement, il faut lire les
arguments avec le regard de l'évidence, sans construction de sens
ajouté ?
La dialectique s'oppose à la rhétorique, affirme le stoïcisme.
C'est la question de la provenance de la fiabilité qui se pose
ici. Cette provenance est un mystère qui n'a pas fini de poser
question.
C'est la question de l'épistémologie qui est loin d'être
tranchée.
Quelles
sont les lois de la nature, des lois sans raison, hasardeuses ou bien
des lois intentionnelles, réglées sur un sens, une volonté
précise ?
Stoïciens et Epicuriens adopteront chacun un point de vu opposé.
L'expérience
n'est-elle pas le lieu de la connaissance fiable, ne l'est-elle pas plus
que la raison qui n'est que spéculative ?
C'est Guillaume d'Ockham qui pose plutôt une affirmation.
Mais la question reste ouverte car entre logique comme seule moyen de
fiabilité et l'expérience comme seule élément
de fiabilité, comment faut-il chercher sa route vers la fiabilité
de la connaissance ?
Comment
est construit le langage en nous-mêmes ?
C'est Hobbes qui propose une formulation du mouvement, traduit en image,
puis associé en mot. Cette explication pose la question du langage:
comment est-il construit en nous pour pouvoir rendre compte d'images intérieurs
?
Qu'est-ce
qui est démontrable ?
Descartes propose une méthode pour démontrer les choses
de façon fiable, du moins il le dit, reste à voir les capacités
de sa méthode...
Pour
bien connaître faut-il tout décomposer en petits problèmes
élémentaires ? Est-ce toujours possible ?
Descartes le propose, mais la question se pose.
Tout
dans la nature se réduit-il à de petits éléments
accessibles par l'évidence de la raison pour former une science
complète de toute la nature ?
C'est encore ce que Descartes propose, mais il n'y a pas de raison évidente
qui imposerait que tout se décompose en réalités
évidentes. Les progrès de la science semblent bien reposer
sur ces décompositions (au moins en partie). Mais est-ce là
un principe de base ?
Il faudrait aussi croire que la science peut tout atteindre et cela est
beaucoup moins évident.
La
raison doit-elle toujours s'appuyer sur des évidences pour démontrer
quelque chose?
Selon ce que dit Descartes, il faut tout ramener à l'évidence.
Qu'est-ce
que l'évidence ?
Contrairement à la foi de Descartes, c'est justement la notion
" d'évidence " qui conduit Pascal à déduire
que l'intelligence et les constructions de l'intelligence sont finalement
peu de chose face à ce qui nous est donné dans la "
lumière naturelle ". Il faut toujours se rapporter aux lumières
naturelles pour démontrer. Qu'a-t-on finalement démontrer
? L'homme ne peut rien faire par lui-même, il est complètement
inconscient de l'essentiel du travail qui se fait seul en lui.
L'évidence est donc le mystère irrésoluble et essentiel
sur lequel repose la connaissance, l'argumentation est peu de chose.
Qu'est-ce
que la liberté, une illusion ou une réalité profonde
en l'homme ?
Descartes la ressent comme essentielle, Malbranche tente de la décrire,
mais Spinoza la remet complètement en cause en affirmant que ce
sont des causes qui nous font " vouloir " ; de sorte que nous
voulons, mais pas librement.
Cette question est encore une question fondamentale aujourd'hui.
Pourquoi
est-ce que l'homme désire ?
Spinoza constate que l'homme désire, mais le pourquoi lui est invisible.
Qu'est-ce
que Dieu ?
Cette question immensément renouvelée est en général
résolue sur une forme logique. C'est une place métaphysique
qui est cherchée à Dieu.
Comment
les choses peuvent-elle exister hors de nous pour elles-mêmes ?
Leibniz y voit une impossibilité. Rien ne peut exister sans qu'il
y ait un fond à l'existence (comme nous qui existons car il y a
en nous ce " moi "). Il munit donc les " choses "
d'un être qui produit leur existence. Il appelle ce " fond
de l'existence réelle" les monades.
Cela repose à nouveau la question de l'existence : qu'est-ce que
signifie exister ? Quelles sont les choses qui existent et celles qui
ne sont que des idées ?
En
quoi la connaissance du langage nous aide-t-elle à connaître
nos connaissances ?
C'est Locke qui par son étude du langage nous inspire cette question.
En
quoi la connaissance de notre raison nous aide-t-elle à connaître
nos connaissances ?
C'est Kant qui par son étude de la raison nous inspire cette question.
Peut-on
connaître les causes et les raisons de l'organisation sociale humaine
?
C'est Rousseau qui nous interroge sur cela, car on peut ne pas partager
son analyse.
Tout
ce qui nous apparaît n'existe d'abord que dans nos pensée,
comment peut-on affirmer l'existence des choses extérieure à
nous ?
C'est Berkeley qui nous inspire cette question troublante quand on se
laisse saisir par sa logique.
D'ailleurs ce qu'il dit semble vrai : ce que nous " percevons "
est bien différent des sensations que nous considérons comme
" stimulées ", selon ce que Pyrrhon suggérait
nous ne voyons pas que des taches de couleur, mais beaucoup plus, nous
voyons des objets en volumes, en regardant la même chose nous somme
concentré sur bien des choses différentes : sa forme, sa
couleur, sa nature, sa position, etc . Quelle est donc " cette
chose " que l'on ajoute à la réalité perçue.
Au final, la question de la réalité extérieure dans
laquelle on vit si commodément pose un problème de logique.
Problème renforcé par les découvertes ultérieures
de la science qui vont nous montrer que la réalité profonde
n'est pas celle que l'on voit. Ainsi, nous pouvons nous convaincre que
les perceptions que nous avons au-dessus des informations sensorielles
sont bien différentes de la réalité elle-même
(comme le disait Démocrite).
Au final, qu'est-ce donc que cette réalité en dehors de
nos pensées ? Selon Berkeley tout ce discours sur " la matière
" et sur " l'être " est illusoire. Car tout n'est
finalement que dans notre pensée.
Berkeley ne remet pas en cause qu'il y ait " quelque chose "
dehors, mais il affirme qu'on ne peut rien dire sur ce que c'est car toute
ce que nous en savons n'est que pensée en nous.
D'autres iront jusqu'à nier toute réalité en dehors
de nos pensée (le sollipsime).
Quel
est la forme, le fonctionnement et la nature de nos pensée ?
Berkeley nous conduit naturellement à cette question puisqu'il
ramène tout à la pensée.
Comment
s'articule le lien entre la réalité et la pensée
?
Kant propose que l'expérience sensible est la matière brut
issue du réel et que la pensée est une organisation de cette
matière brute.
En
quoi la raison est-elle limitée ?
Kant à partir de sa description de la raison vue comme organisation
du sensible, propose que s'élever par l'organisation au-delà
d'un support expérimental n'est pas raisonnable.
La
réalité est-elle scindé en deux partie, une extérieure
une intérieure ?
C'est ce qu'affirme Kant en posant la réalité extérieure
comme des " en-soi " et la réalité intérieure
comme des phénomènes qui sont finalement les seuls à
être vraiment accessibles comme le disait Berkeley.
Mais en proposant cette dissociation comme une explication de la réalité,
Kant met à jour une fracture difficile à résoudre
qui place l'homme dans le côté intérieur de cette
scission.
Comment peut-on aborder une réalité scindée en deux
? C'est la question qui se pose après Kant. Lui-même n'avait
fait que montrer comment s'organisaient les données sensibles entre
l'extérieur et l'intérieur. Cette question existe encore
aujourd'hui dans beaucoup de philosophies. C'est même une question
qui est devenue centrale, chacun se positionne ou essaie de se positionner
par rapport à cette fracture en se plaçant d'un côté
ou de l'autre, en réduisant la fracture ou en la niant
La
pensée est-elle incapable de décrire le divin, la métaphysique
? Quel est la nature, la forme, l'organisation de notre réalité
intérieure ?
Kant affirme l'incapacité d'accéder à la métaphysique
non sensible. Mais tout de suite derrière lui, bien d'autres s'empresseront
de le refaire (les idéalistes allemands). Pourquoi ? Parce qu'en
posant, au fondement de la réalité, une dissociation entre
l'intérieur et l'extérieur, Kant offre sur un plateau une
" nouvelle réalité " qui est la " réalité
intérieure ". Elle reste complètement à définir.
Et quoi d'autre que la logique pour y accéder ? Ainsi, c'est la
découverte par Kant d'une réalité intérieure
jusque là assez négligée qui pose le pavé
dans la marre. D'autant qu'il s'agit de la principale réalité,
l'autre étant inaccessible dans le fond. Il va falloir expliquer
cette réalité intérieure non seulement dans sa capacité
d'accéder à l'extérieur, mais aussi pour elle-même.
Qu'est-elle donc? Quelle est sa forme, son essence, son existence, etc...
? Et curieusement juste après l'avoir écartée, la
métaphysique reprend de plus belle.
Quand
on cherche dans la pensée, tout au fond, ne trouve-t-on pas tous
simplement " soi " (au cur de la conscience) ?
C'est Fichte, qui renverse ainsi la réalité.
Au lieu d'aborder la réalité par " comment l'extérieur
s'inscrit-il en moi ", il est préférable de commencer
par définir l'intérieur qui est capable de recevoir cet
extérieur. Or l'intérieur est directement accessible. C'est
d'ailleurs réconfortant pour la philosophie, parce que le "
Moi " semble être enfin un point d'appui, une réduction
qui ne se réduit plus. De plus elle possède quelque chose
d'absolu au dire d'Hegel ou de Schelling. On trouve là, le fondement
de nombreuses et nouvelles philosophies auxquelles Kant n'avait pas soupçonner
d'ouvrir la porte.
Au
cur de nous-mêmes, comme fond de ce moi, ne trouve-t-on pas
la liberté ?
C'est ce que nous dit Schelling. La découverte et les formes du
" Moi " seront abondamment commentées.
La
question de l'être (l'existence) peut-elle être articulée
de façon cohérente ?
Hegel propose tout un système logique qui explique la notion d'être
en montre l'impact dans la société et dans la vie. C'est
l'apogée du discours idéaliste.
A
quoi bon tout ce discours métaphysique qui spécule dans
le vide logique, concentrons-nous plutôt sur ce qui est clairement
reconnaissable par tous : la science ?
C'est l'avis d'Auguste Comte qui définit le positivisme.
Non
! Ce n'est pas la logique qu'il faut suivre, au contraire ! nous avons
pris conscience qu'au-delà de toute spéculation métaphysique,
de tout système d'explication, il est des réalités
intérieures qui existent et sont le fond de notre existence. N'est-ce
pas en nous-mêmes dans notre vie intérieure que se trouve
l'essentiel, au-delà de tout système logique ?
C'est ce que proposera Kierkegaard : il n'y a pas de système qui
explique la vie, il y a la vie en nous-mêmes.
Les théories abstraites ne servent à rien pour l'homme et
ne sont pas fiables. Et d'une certaine façon, on trouve aussi Nietsche
dans cette direction.
Au
cur de nous même, comme fond de ce moi, ne trouve-t-on pas
la volonté ?
C'est ce que nous dit Schopenhauer en présentant la volonté
comme ce qui lie et qui fondent toutes les réalités.
Au-delà de Schopenhauer, si l'on réfléchit sur la
volonté elle nous interroge. Et , quelle est donc la portée
de notre volonté ? Elle semble si réel si fondamentale ;
c'est notre liberté, notre force. Et pourtant certains disent qu'elle
n'est qu'une illusion, que la réalité serait complètement
déterminée de façon mécanique indépendamment
de cette illusion. Qu'est-ce donc que la volonté en nous ? Est-elle
libre ?
Stoppons
la machine philosophique qui s'enraye. N'est-ce pas justement cette théorie
que l'on veut construire, cette logique que l'on veut établir,
cette réduction que l'on tente d'accomplir qui enferme l'homme
dans un regard et une morale stérile ?
C'est ce que dit Nietsche qui rejette toute réduction logique pour
proposer à l'homme sa vraie dimension : la force et les pulsions,
les différences, le hasard comme le sens qu'il faut rechercher
afin de ne pas s'enfermer dans une réduction stérile. On
peut comprendre ces revirements. En effet, les grands systèmes
philosophiques comme celui de Hegel, semble enfermer l'homme dans une
logique purement dogmatique. En rien il n'apporte la conviction, et donc
la fiabilité, c'est une simple construction d'un système
logique.
Devant
l'incapacité de résoudre les questions les plus simples
par la philosophie de la raison logique, de la raison fiable ou de la
raison vécue, beaucoup de nouveaux philosophes vont rejeter le
discours théorique pour proposer directement une réponse
à la question finale : " un regard nous donnant la réponse
au que faire de la vie ". Nietsche propose la libération des
forces vives. Kierkegaard propose la foi vécue. Bien d'autres propositions
suivront. Quelle approche est donc la plus convaincante ? Quelles bases
choisir pour approcher l'homme ?
A partir du moment où la logique n'a pu réussir à
réduire la réalité à une forme logique, la
philosophie va utiliser toutes les approches susceptibles de produire
une regard global, absolu ou réduit. Une recherche de réduction
se poursuit sur toute sorte d'approche : psychologie, ethnologie, sociologie,
histoire, psychanalyse, épistémologie, logique formelle,
linguistique,...
Mais
tous ces discours ne sont-ils pas des idéologies complètement
vaines si l'on ne revient pas aux réalités terre à
terre qui donne du sens au quotidien dans toute l'histoire de l'homme
: le travail ?
Le travail, c'est ce qu'il faut regarder pour comprendre la dimension
humaine. Car l'homme doit être vu dans son histoire, et dans les
structure qui y apparaissent, pas seulement en théorie. C'est ce
qu'affirme Marx.
Il va donc analyser les relations entre les hommes, les classes, le rapport
à l'argent (comme un résultat abstrait du travail qui dénature
ainsi le sens de l'homme), les structures humaines de pouvoir
La
réalité n'est-elle pas ce que nous vivons à chaque
instant ?
Dit Bergson qui refuse l'idée Kantienne que les choses ne font
qu'apparaître au travers d'un filtre. C'est le temps qui passe et
s'inscrit dans la durée qui nous donne la mesure de notre réalité.
Quand
on analyse le contenu de notre pensée n'y a-t-il pas plutôt
un mélange, une transformation, une évolution plutôt
qu'une succession de pensée figée ?
Bergson refuse le découpage en instants qui a gâché
la vue générale de beaucoup de philosophie.
N'est-ce
pas le devenir qui importe plus que l'être, la vie n'est-elle pas
une évolution en devenir ?
Bergson pose alors naturellement la question du " que faire "
qu'il résout par le paradigme biologique de l'évolution
vers le mieux.
Mais
enfin...par quel bout approcher le problème ?
Le manque de fiabilité s'impose, car on propose une direction (et
un regard particulier) avant même d'avoir senti de façon
fiable une réduction.
Aussi la réduction est-elle une recherche qui perdure et cela dans
quelques directions privilégiées :
· l'intérieur de nous-mêmes comme seul centre absolu
de la réalité : c'est la phénoménologie qui
cherche à trouver le sens réduit dans l'ultime perception
intérieure : la recherche des états de conscience face à
la vie. Il semble que la conscience soit le cur de la réalité
où il faut y chercher le sens et donc la direction de la vie. C'est
le chemin de Husserl, Heidegger, Sartre, Merleau-Ponty chacun selon une
morphologie propre.
· La logique fiable qui est le coeur de la fiabilité des
sciences et la base de la réalité qui est fiable, on trouvera
donc dans la logique une réduction qui permettra une compréhension
fiable de la réalité. C'est Frege puis Russel, et Wittgenstein
qui tentent de réduire le monde et le sens à la logique
fiable.
· Le langage comme cur incontournable de toute construction
de sens. Ainsi la philosophie du langage est le lieu possible de la réduction
du sens. Mais le langage peut-être approché de façon
très différente qui peut donner lieu à des réductions
très variéees. Plus structurelle, plus sémantique,
ou plus herméneutique,...
· L'anthropologie comme observation de l'homme qui trouve bien
difficilement une réduction tant les approches sont variées
et difficiles à réduire naturellement.
· La psychologie qui parvient avec grande peine à trouver
des réductions naturelles.
· ..
b
- Et la fin de l'histoire ?
Selon le schéma en trois piliers proposés au départ,
on voit que dans l'ensemble la philosophie, faisant usage de la raison,
doit déterminer le statut de la raison (et donc de la philosophie
elle-même). On entendra même des discours philosophiques affirmer
: " les seuls discours sensés sont... " (Wittgentstein,
Carnap).
Curieux phénomène que la philosophie qui cherchant le sens
par la raison finit par chercher le sens de la raison. La philosophie
et la raison ont des histoires très liées, et la raison
est bien mystérieuse. On le constate... quand on regarde la philosophie.
Dans la philosophie, on est face à une curieuse découverte
: cherchant à s'affranchir des " dogmes " pour trouver
le sens, on propose des " approches " qui rendent compte d'une
réalité plus large (ou tout simplement différente?).
Mais au résultat, une approche n'est-elle pas toujours une explication
unifiée de nature dogmatique. Comment pourrait-on l'éviter
?
On découvre là, le grand vide du sens. Il faut nécessairement
le prendre par un bout. Est-ce le sceptique qui parle ? Non, car je ne
suis pas sceptique, il me semble et je montrerais pourquoi je crois qu'il
existe des réalités fiables.
Seulement, la réalité du sens de la vie et de la direction
à suivre, semblent s'imposer à nous par la nécessité,
être vécus en nous par la force de nos appuis, et se dérober
à tout accès raisonnable.
On vient à la vie avec du sens et l'on sait par la raison fournir
une critique, une analyse, une argumentation, un positionnement de toutes
sortes de sens. On sait même établir des liens de sens tout
à fait fiable entre des réalités autour de nous.
Mais on ne sait pas prendre le sens par un autre bout que notre histoire,
le point où l'on est parvenu avec notre analyse et nos croyances
dont on n'est même pas capable de rendre compte avec fiabilité.
Voilà mon constat personnel.
Maintenant la philosophie a fait bien des découvertes sur sa route
:
· des facultés immenses de la raison : la science, la logique
et l'analyse, en d'autre terme elle à mis à jour une objectivité
de la connaissance jusque là inconnue.
· elle a aussi mis à jour de nombreuses questions pertinentes
dont il faut rendre compte.
Bien que cela dénature profondément le réalisme historique,
ce que j'ai volontairement omis de préciser dans ma petite histoire
personnelle de la philosophie, c'est que la plupart des philosophes déduisaient
de leurs théories la direction que l'homme avait à suivre
pour sa vie. Si j'ai omis cette " histoire de la direction à
suivre ", c'est parce qu'il me semble fort que les questions de la
philosophie ouvre principalement l'esprit sur des questions (pertinente
ou non). C'est ce qui reste après qu'on ait oté le dogmatisme
de la plupart des choix proposés. Car les directions choisies reposent
principalement sur un fond de croyance non raisonnable. La philosophie
ne peut prétendre à l'unité du sens, il faut donc
suspendre le jugement de la direction à suivre sur la base d'une
raison philosophique.
Mais la philosophie sachant sortir des sentiers tracés en cherchant
du recul offre des questions qu'il faut tenter de résoudre parce
qu'elles portent en elles beaucoup de sens. L'histoire montre qu'on est
parvenu à avancer considérablement dans la réponse
de certaines questions. Ces réponses ont eu impact important sur
l'existence concrète des hommes, ce qui montre que la philosophie
est utile.
Reste à savoir si cela suffit pour affirmer que la philosophie
est bonne. Mais c'est justement la question qu'elle ne parvient pas à
résoudre dans le fond... car le bien, c'est connaître la
direction.
La Science est recherche de la réalité objective partageable.
Le sens est le ressenti instantanné d'un tissu organisé
de concepts formant une unité cohérente liée à
la totalité de nos aquisitions (qui sont pour chacun un autre sens).